Marcel Mahouvé
Nombreux sont
les joueurs ayant fait du football leur métier. Seule une
infime partie d’entre eux peut se targuer d’avoir
effectué une carrière internationale. Encore plus
rares sont ceux qui ont disputé une phase finale de Coupe
du Monde avec une sélection d’un niveau appréciable.
Mais un seul joueur est parvenu, du moins à ma maigre connaissance,
à défendre haut et fort les couleurs de son pays
lors d’un Mondial tout en effectuant une carrière
apocalyptique, de son pays natal au championnat de la Réunion,
en passant par Montpellier, la L2, les tréfonds du championnat
écossais et même l’extraordinaire ligue finlandaise.
Ce joueur, c’est Marcel Mahouvé.
Indéfinissable est la carrière
de ce franco-camerounais dont les premières apparitions
sur les pelouses françaises furent en tout point remarquables.
Tantôt attaquant, tantôt milieu, c’est finalement
à un poste de vigie du milieu de terrain que Marcel s’est
stabilisé avec son club post-formateur de Montpellier entre
1997 et 2002. Repéré par Michel Mezy alors qu’il
évoluait dans le championnat camerounais, le costaud Marcel
obtient donc la possibilité de côtoyer Laurent Robert,
Franck Sauzée ou Ibrahima Bakayoko à la Paillade.
Inutile d’indiquer que c’est surtout du dernier nommé
que Mahouvé s’est inspiré pour se forger une
identité piedcarreque.

Marcel avec le maillot de l'Inter.
Turku certes mais l'Inter quand même
A ce stade, il semble important
de préciser que Marcel n’a jamais été
un joueur foncièrement mauvais. D’ailleurs, si c’était
le cas, nous ne nous attarderions même pas sur son cas.
Non, le Camerounais, doté d’un physique de grizzly
de combat, convainc tous les observateurs lors de ses premières
sorties sous la tunique héraultaise. A tel point qu’il
dispute la Coupe du Monde 98 avec des Lions aussi indomptables
que peuvent l’être Samuel Ipoua, Didier Angibeaud,
Pierre Njanka ou Jean-Jaques Etamé. Aussi, des émissaires
de l’AS Roma tentent d’enrôler Mahouvé
à l’aube du troisième millénaire mais
fidèle au Président Nicollin, Marcel déclinera
cette belle offre qui constituait pourtant une opportunité
qui ne s’est malheureusement jamais représenté
par la suite.
Et pour cause, les derniers mois
de Marcel à Montpellier ont été pour le moins
chaotiques. Alors que son volume de jeu grandit et que l’attente
du public à son égard se fait de plus en plus pressante,
Mahouvé perd ses moyens… et ses nerfs. En véritable
boucher, il coupe et découpe les jambes adverses qui se
trouvent dans son périmètre de sécurité.
Légèrement vilipendé par les supporters montpelliérains,
le Camerounais tente de désamorcer la brouille naissante
en adressant un charmant doigt d’honneur aux tribunes de
la Mosson, ce qui n’aura bizarrement pas l’effet escompté.

"Makélélé
m'a tout pris. Le visage, le style de jeu, Noémie Lenoir.
Tout."
Ce coup de sang malheureux n’est
qu’une des nombreuses facéties qui vont animer la
suite et la fin de la période héraultaise du bonhomme.
En effet, Marcel, soucieux de prouver qu’il n’est
pas qu’un ratisseur infatigable décide de planter
également des buts. Et c’est de la main que l’Africain
va trouver les chemins des filets contre Châteauroux en
2000. Est-ce le fait d’avoir imité Maradona sur le
terrain qui va quelque peu faire grossir Marcel ? Difficile à
dire. Toujours est-il que, loin d’être au top physiquement,
Mahouvé enchaîne les calamités à un
rythme infernal. Passes en retrait interceptées, dribbles
au ralenti, cagades en tous genres et tacles véhéments
deviennent le quotidien du joueur qui ne peut alors rêver
du calcio que par le biais de la Série C. Laissé
libre par le MHSC en 2002, le Camerounais décide de rejoindre
Clermont en L2, non sans avoir au préalable gravement blessé
Rudy Riou à l’entraînement.
C’est à ce moment
que la carrière de Marcel prend un véritable virage.
Consacrer cinq saisons à un club, c’est une chose
rare dans le football moderne. Pour rétablir l’équilibre,
le Camerounais décide donc de devenir un footballeur pigiste,
ne demeurant pas plus d’une saison dans un club.
S’il est difficile de savoir
avec exactitude à quel niveau a évolué Marcel
dans les équipes incongrues auxquelles il a prêté
main forte à partir de 2003, on peut supposer qu’il
a fait des ravages dans le championnat finlandais où l’Inter
Turku en a rapidement fait son capitaine. Mais l’expérience
a fait long feu, tout comme celle effectuée à Hamilton
Academical (Ecosse) où à Saarbrücken (Allemagne)
entre 2005 et 2006.

"Non Marcel, c'est juste
un entraînement ! Non arrête ! NOOOOOON !"
Au cours d’une période
indéfinie, il semblerait que Marcel soit devenu un être
ectoplasmique au don d’ubiquité puisqu’il aurait
aussi défendu les couleurs de Saint-Georges-les-Ancizes
en CFA française, mais aussi de clubs chypriotes et indonésiens
(!).
Le SS Capricorne, club de la Réunion,
semble aussi avoir pu compter dans ses rangs l’International
camerounais (38 capes) pendant une courte période. Le tout
en moins de deux années terrestres ! Si l’on oblitère
l’éventualité que les jours s’égrainent
différemment dans la dimension démoniaque permettant
les voyages à travers le temps et l’espace et ayant
englouti Marcel, il semble impossible que tous ces clubs aient
été honorés par Mahouvé. Encore que…
Tacleur patenté avec une
conduite de balle terrorisante et une finesse technique de mammouth,
Marcel Mahouvé mérite donc amplement sa place dans
notre rubrique des bouchers. Certes, nous trouverons toujours
plus maladroit ou plus agressif que lui, mais la trajectoire abracadabrante
de sa carrière est telle que nous nous devions de saluer
la carrière de ce Lion indomptable et à jamais indompté.

"GROAAAAAAAAAAAAR"
Son match parfait
A l’heure de son jubilé,
Big Marc’, décide d’organiser un match entre
quelques anciennes gloires camerounaises et certains Finlandais
rencontrés à l’Inter Turku. Capitaine de la
sélection africaine, Mahouvé s’amuse comme
un fou et tente des gestes techniques qui stupéfient l’assemblée.
Coup du foulard pour servir Romarin Billong, une-deux aérien
avec Albert Meyong Ze, discussions sur la Normandie avec Mohammed
Idrissou, tout y passe même une séance de penalty
improvisée avec Pierre Womé. Au centre de ce mælström
de génie pur, Marcel retrouve ses jambes montpelliéraines
et marque des buts grâce à toutes les parties de
son anatomie. Coude, poignet, épaule, radius intérieur,
auriculaire, revers de la main, rien ne résiste au grand
Marcel qui n’a jamais semblé aussi affûté
qu’à l’heure de son jubilé. A la lumière
de cette rencontre, les dirigeants montpelliérains sont
conscients d’avoir fait une erreur en laissant partir le
joueur et décident de se racheter en engageant Marcel en
tant que coach personnel pour Ludovic Clément et Alexis
N’Gambi.
Deez
10-08-2007